Pharaon, quel fanfaron !
Tout avait commencé quand avant-hier je m'aperçus avec horreur qu'il
ne restait plus que quelques jours pour aller voir l'exposition Toutankhamon,
à la Porte de Versailles à Paris.
Férue d'Egypte ancienne depuis l'antiquité (la mienne), je passe souvent
des dimanche entiers à revisiter la section Egypte ancienne du Louvre,
avec toujours quelques palpitations lorsque j'approche de la fin, les sarco
-phages alignés debout, merveilles des merveilles de poupées gigognes.
Avec celle des rois assyriens, cette partie du Louvre est une de mes préférées.
Je me suis donc dit qu'il ne fallait pas que je laisse passer cette occase, de
m'en mettre plein les mirettes, même si j'ai un peu fait la grimace en voyant
sur l'affiche de 5 m sur 2 que l'expo était sponsorisée par TF1 et RTL, ce qui
est toujours mauvais signe concernant un évènement culturel à mon avis.
(Mais shhh. Ne leur dites pas.)
La tentation est grande en effet de Walt-Disney-iser l'égyptologie, et d'ailleurs
le cinéma hollywoodien ne s'en est guère privé. Pour moi il s'agit d'un crime
de lèse-majesté, car rien n'est plus sérieux et abyssalement intéressant que
l'Egypte ancienne, et on ne peut pas la réduire à trois pelés en short khaki
avec une lanterne qui appuient sur le scarabée d'or d'une grosse porte en pierre
pour découvrir derrière une momie dont la malédiction va inévitablement
s'abattre sur eux.
Alors certes, Indiana Jones est sexy.
Mais n'est pas Howard Carter qui veut.
Après de longues heures d'attente, et je pèse mes mots, (dernière fois que
je n'achète pas mon billet en ligne à l'avance), à me faire engueuler, littéra-
lement, par une apparitrice visiblement fatiguée et lasse de gérer des hordes
de visiteurs comme des moutons récalcitrants, mettez-vous à droite-- ne restez
pas dans le hall-- à quelle heure est votre billet -- non madame faut pas rester
là -- etc-etc-etc, bref tout le cirque que suppose une expo grand spectacle com-
me celle-ci, et avoir délesté mon porte-feuille de la modique somme de 15,90€
soit 1/4 de mon budget hebdomadaire pour me nourrir (à ce prix là, j'espère qu'ils
vont restaurer avec les millions amassés tous les objets jamais découverts dans
la vallée des rois), je suis enfin arrivée dans le sanctuaire.
Je m'étais demandée pourquoi ils avaient fait cette expo à la porte de Versailles
et pas dans un grand musée central de Paris.
J'ai compris en entrant. Ce n'était pas une expo, c'était un show.
Dans les deux premières salles, on vous fait asseoir et regarder la télé, au point
que vous vous demandez si vous n'auriez pas mieux fait de regarder un bon vieux
docu sur arte. Ensuite, mise en scène, on vous fait découvrir la tombe "telle que
Howard Carter l'a découverte, dans le même état où il l'a trouvée".
Avec des éclairages successifs, on vous oblige donc à regarder tel truc ou tel
truc, ce qui pour moi est parfaitement insupportable puisque forcément je
veux voir le truc qui est dans l'ombre et que personne n'a remarqué. Bref.
Tout ça dure 15 mn d'explications, vous êtes "comme Howard Carter", avec
le portable de la meuf d'à côté qui sonne et ses fils qui grimpent sur le banc
où vous êtes assise, voire sur vos genoux. Bref. Heureusement, car je commençais
à pleurer intérieurement, ça s'arrange après : on vous rend votre liberté (toute
relative car vous êtes quand même obligée de vous fader l'audiophone pour
comprendre quelque chose, mais bon à ce prix là vous prenez tout ce qu'on vous
donne). Et donc, vous pouvez circuler dans le reste de l'expo à votre guise, prendre
des photos, naviguer, et enfin, apprendre quelque chose.
Voici ce que vous voyez, ensuite :
Je préviens tout de suite que les personnes qui ne supportent pas la vue
de l'or feraient mieux d'aller respirer un bon coup ou faire un tour, car ça
ne va pas en s'arrangeant. Il s'agit de la chambre funéraire ? mortuaire ?
où était entreposé le sarcophage du pharaon. Je dis ça mais ne comptez
pas sur moi pour vous donner des détails exacts ou vous faire la visite,
je m'endormais à moitié en écoutant l'audiophone, au point qu'il fallait
que j'écoute deux fois tellement c'étaient d'abord mes yeux qui fonctionnaient
et pas mes oreilles.
Puis, à mesure que vous avancez, vous apercevez au loin ce pourquoi vous
êtes venus : la momie et ses différents sarcophages, qui même s'ils sont
des reproductions, font pas mal d'effet à voir en vrai.
Poids du sarcophage : 110 kilos d'or fin. (Le grand je crois.)
De quoi éponger pas mal de dettes, et de voir venir.
Il n'y a pas à dire : elles (ils?) sont tout simplement merveilleuses à contempler.
Une vision de ce que l'homme peut accomplir de plus raffiné, de plus beau et de
plus noble. Ça vous en fiche un coup, même si vous êtes glacée et sophistiquée,
sceptique et cynique comme moi au départ. Vous ne pouvez pas résister.
Vous fondez.
Vous vous perdez dans l'admiration des détails, l'incrustation en double couleur
dans chaque écaille, une ligne sur deux, les hiéroglyphes sur le bord, le dos même
du sarcophage-- qui sont absolument somptueux.
Ensuite, vous tombez amoureux.
De ce visage parfait, aux traits mondialement connus, au regard si chaleureux
et expressif, et surtout, si doux.
Alors bien sûr, tout le monde connait cette image. Mais là, vous la voyez en 3D,
pour de vrai, et c'est vous qui avez fait la photo !! Et ça, ça change tout !
Si vous voulez mon avis, ils ont bien fait, en exposant la momie, de lui
garder son heaume royal sur la tête. Car en vrai, le pharaon d'or de 20 ans
ressemble à ça (âmes sensibles, attention...)
Ou peut-être à ça, quand il était en vie :
Vous voyez bien ce n'était qu'un homme comme les autres...
Enfin pas tout à fait, apparemment.
Car quand la tapisserie chez vous ressemble à ça ...
Et que votre dernière tenue sur cette terre ressemble à ça ...
La question de savoir s'il fallait qu'il repose en paix dans ce sanctuaire, ne se pose
même plus quand vous voyez ces objets.
Cela aurait été une trop grosse perte pour l'humanité s'ils n'avaient pas été mis
au jour. Ils nous apprennent bien plus sur l'Egypte ancienne que ne l'auraient fait
n'importe quelle chronologie de rois. Ils nous apprennent des choses sur comment
les rois vivaient, à quel degré de technicité les artisans étaient arrivés, quel
raffinement cette civilisation avait atteint. Ils nous renseignent même sur l'état de
la terre à cette époque, puisqu'il parait qu'une des pierres utilisées pour les incrus-
tation provenait d'une météorite !
Les objets sacrés entreposés dans la tombe font de même. Ils témoignent de
la particularité de leurs rites funéraires, dans une débauche d'or et d'albâtre.
Si la puissance se mesurait à la somme des richesses... combien impressionnant
est ce règne, si court, d'un pharaon qui ne laissa aucun descendant.
(Enfin, on a quand même retrouvé des mini-sarcophages de ses enfants morts
dans sa tombe)
Canopes, contenant les viscères du pharaon. Chic et de bon goût.
Jaccuzi, en albâtre. Non heu... canopes...
A cette occasion, j'ai d'ailleurs redécouvert l'albâtre.
J'en avais déjà vu, au Louvre et ailleurs, mais celui-ci a l'air particulièrement
rond et chaud et doux et agréable et magnifique, ce qui est assez stupéfiant
pour une pierre, que j'assimilais au marbre froid, et dur brrr.
Voilà, maintenant je vois bien ce que ça peut être, un veau d'or.
Chien-chien (Anubis) hihi ! Le plus marrant, c'est sa queue :)
Le Dieu portant pharaon
Voilà, c'est fini pour aujourd'hui. On est tout petits, hein?
La prochaine fois, je vous parlerai des bijoux de Pharaon, et aussi
des objets de son palais, héhé...
Stay tuned !
Bonne rentrée :S
Saucisse-Hatchepsout d'Egypte.